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La finance peut-elle devenir plus vertueuse ?

Les thuriféraires du bitcoin et des cryptomonnaies le promettaient : ils allaient construire un écosystème différent de la finance classique, plus accessible, indépendant, et même plus propre. Las, le 21 novembre, Changpeng Zhao, ancien patron de Binance, plate-forme d’échange de cryptomonnaies représentant plus de la moitié du marché mondial, a été condamné à 3,9 milliards d’euros d’amendes aux Etats-Unis pour avoir violé les lois antiblanchiment. Trois semaines plus tôt, Sam Bankman-Fried, fondateur de FTX, une plate-forme du même genre, a été reconnu coupable de fraude et d’association de malfaiteurs à New York.
C’est un fait : certains acteurs des cryptomonnaies profitent des failles réglementaires pour s’adonner à des activités illicites. Mais, désormais, juges et régulateurs sont à leurs trousses.
D’une certaine façon, c’est l’histoire du chat et de la souris, et elle n’est pas nouvelle. Depuis le grand mouvement de dérégulation de la finance entamé dans les années 1980, les innovations dans le secteur s’accompagnent régulièrement d’excès, avant que les superviseurs ne s’attellent à les limiter.
L’illustration la plus douloureuse fut sans doute la crise des subprimes. Celle-ci a été provoquée en 2007 par l’endettement excessif des ménages américains. De petits génies de la finance avaient alors « titrisé » leurs crédits – ils les ont transformés en titres – afin de les revendre sur les marchés. Cela de façon excessive et incontrôlée, loin des radars des superviseurs, ce qui dissémina le risque puis la panique dans l’ensemble du système financier.
Les années suivantes furent celles du grand ménage. De nouvelles règles ont été édictées (celles de Bâle III) pour renforcer les banques et limiter les prises de risques. La zone euro s’est dotée d’un gendarme bancaire unique pour muscler leur surveillance. Avec succès : le système s’est assaini, « preuve que la finance peut changer et devenir plus vertueuse, mais pas spontanément », résume Jézabel Couppey-Soubeyran, économiste à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne.
La tâche est sisyphéenne : les dérives de FTX et Binance ont rappelé que les régulateurs ont toujours un cran de retard sur les innovations financières.
Aujourd’hui, cette tâche se double d’un autre enjeu : le verdissement. Face au dérèglement climatique, la finance doit à la fois cesser d’apporter des fonds aux industries polluantes et en fournir à celles qui permettront la transition énergétique. Elle a entamé sa mue : les banques, fonds d’investissement et autres gestionnaires d’actifs affichent désormais des indicateurs climatiques et des labels, comme l’investissement socialement responsable (ISR), décerné à ceux qui intègrent des considérations sociales et environnementales à leur politique d’investissement.
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